Il se pourrait bien que ce
récit soit la première pièce de théâtre présentée sur ces pages, depuis l’ouverture du blog.
Comment est-elle arrivée entre mes mains, me direz-vous ? Cela s’est fait grâce aux Editions Albin Michel, qui me permettent de présenter quelques-uns de leurs titres, dans le journal pour lequel je bosse. (je les remercie au passage !)
Eric-Emmanuel Schmitt n‘est pas un inconnu pour moi. Découvert avec son terrible La Part de l’autre, retrouvé l’été dernier avec son superbe La femme au miroir, cette prise de contact est l’occasion pour moi de me familiariser avec une forme de texte que je ne connaissais pas encore chez lui : le théâtre.
Comédien adoré du public, Alex, homme aimable et tolérant, s’apprête à entrer en scène pour la première du Misanthrope lorsque Alceste, le vrai, l’homme aux rubans verts de Molière, lui apparait dans le miroir de sa loge. La stupeur passée, la conversation s’engage mal entre celui qui voudrait changer le monde, et celui qui l’accepte tel qu’il est. Qui triomphera, de l’idéaliste en colère qui s’indigne de la vie ou du libertin indulgent qui en rit ? Et lequel des deux gagnera les faveurs de l’insaisissable Célimène.
Dns cette brillante variation sur la plus énigmatiques des pièces de Molière, Eric-Emmanuel Schmitt, l’un des auteurs les plus joués au monde, renoue avec la verve qui a fait le succès de son œuvre dramatique, du Visiteur à Petits crimes conjugaux, en passant par La Tectonique des sentiments.
L’espace d’un instant, mon esprit se trouble à l’ouverture du livre. Je n’ai pas lu de théâtre depuis des années, depuis le lycée, certainement. Les textes ne me parlaient pas, je ramais à lire des longues litanies en alexandrins, avec une façon d’écrire qui ne me convenait pour ainsi dire jamais !
A la lecture des première lignes de cette pièce Un Homme trop facile, je voyais les personnages évoluer autour de moi, regrettant toute fois de devoir couper ma lecture, à plusieurs reprises, et non la savourer, comme une vraie représentation de théâtre, dans ma tête, le temps de voir l’histoire défiler sous mes yeux.
Les échanges entre les personnages sont vifs, entrainants, accrocheurs. Difficile de résister à ce dialogue entre le comédien et le personnage d’Alceste, cynique, mordant, accusateur…
Les échanges varient entre prose et alexandrins. L’auteur présente un duel entre ces deux personnages qui ne se ressemblent pas, le premier, du haut de son ancienneté et de sa stature de personnage forgé par Molière, juge le second et ce monde si différent du sien. Il appelle à l’autorité, au mépris, au chacun pour soi…
Alex, quant à lui, est à l’écoute du monde, de son public, de cette comédienne qu’il convoite, alors que celle-ci brille par sa frivolité. Les personnages se croisent, se rencontrent ou s’évitent. Alceste n’est visible que d’Alex, et observe le quotidien du comédien à quelques minutes du lever de rideau, témoin d’une époque qui n’est plus la sienne depuis longtemps déjà !
Ce que je retiens de cette lecture, c’est cette impression de suivre une pièce jouée devant mes yeux, même si, parfois, l’œil regarde dans le vide, et que les moments d’absence rendent les échanges entre Alceste et Alex, incompréhensibles, tout simplement parce sue j’étais ailleurs. C’est ce qui me retient de dire sue c’était une lecture totalement enthousiasmante. J’ai décroché, mais je pense que, peut-être la pièce, lue dans un autre cadre et un autre contexte, aurait bien mieux passé.
Je note la facilité de lecture, dans le sens global, des écrits d’Eric-Emmanuel Schmitt, qui permet ainsi à un grand nombre de toucher à différents sujets, différents styles. Loin de connaître toute sa bibliographie, c’est un auteur que j’apprécie. Et que j’espère avoir de nouvelles occasions de le croiser, à travers mes lectures.
Jusqu'au mois de mai, cette pièce de théâtre est jouée sur la scène parisienne, à la Gaité Montparnasse. Pour ceux qui préfèrent découvrir sur scène...
Merci encore à Albin Michel, pour cette découverte.